Une exception en France : dans cette région, les héritiers sont exonérés de droits de succession

Dans une France où les successions peuvent peser lourd, une région échappe aux règles fiscales habituelles. Depuis des siècles, ses habitants profitent d’un régime d’exception qui suscite autant de curiosité que de débats. Où se trouve ce territoire rare où hériter ne rime pas avec facture ? La réponse est aussi inattendue que symbolique…
En France, hériter peut coûter très cher
mother handing key to daughter
En matière de succession, la France figure parmi les pays les plus sévères. D’après l’OCDE, elle se classe troisième au monde pour la taxation des transmissions patrimoniales. Lorsqu’un parent décède, les biens qu’il laisse à ses enfants ou héritiers sont imposés selon un barème progressif basé sur la valeur et le lien de parenté.
Un abattement de 100 000 € est accordé entre parents et enfants, mais au-delà, l’imposition varie de 5 % à 45 %, selon les montants concernés. Résultat : un bien immobilier de valeur peut rapidement devenir un fardeau fiscal pour les familles.
Une exception notable : la Corse
Mais en Corse, la situation est bien différente. Sur l’Île de Beauté, les héritiers bénéficient d’une exonération spécifique des droits de succession sur les biens immobiliers situés sur l’île. Cette particularité remonte à un décret napoléonien de 1801, qui conserve encore aujourd’hui une portée partielle.
Dans les faits, de nombreux biens se transmettent encore sans enregistrement formel ni division juridique. On parle alors de biens en indivision, partagés entre plusieurs membres d’une même famille, souvent sans acte notarié précis. Faute de titres clairs, l’administration fiscale peine à estimer leur valeur.
Une exonération partielle prolongée jusqu’en 2037
En 2002, une réforme est venue encadrer cette exception. La loi du 22 janvier 2002 a instauré un abattement de 50 % sur la valeur des biens situés en Corse, pour toutes les successions ouvertes après cette date. Cette mesure devait initialement prendre fin en 2027.
Mais la loi n°2025-115 du 7 février 2025 a prolongé cette exonération partielle jusqu’en 2037. Une décision saluée localement, notamment par le sénateur Jean-Jacques Panunzi, à l’origine de la proposition. L’objectif affiché : laisser aux familles le temps de régulariser des biens souvent transmis de manière informelle depuis des générations.
Un levier pour régulariser les successions
Pour l’État, cette prolongation est aussi un moyen d’encourager la régularisation des propriétés. Malgré des progrès notables depuis 2017 – avec plus de 15 000 parcelles clarifiées –, près de 300 000 restent encore sans titre de propriété officiel sur l’île.
L’enjeu est double : clarifier les droits fonciers pour une meilleure gestion du territoire, tout en préparant une harmonisation progressive de la fiscalité avec celle du continent. Mais sans heurter une culture insulaire profondément ancrée dans la transmission familiale directe.
Hériter sans tracas… mais pas sans formalités
Attention : cette exonération ne dispense pas d’un passage chez le notaire. Toute succession doit être enregistrée officiellement, même si les droits à payer sont réduits. Ce formalisme reste essentiel pour sécuriser les transmissions et éviter les conflits familiaux.
Un privilège local qui questionne
Cette situation, unique en France, suscite parfois des critiques de la part des contribuables du continent, confrontés à des taux plus élevés. Mais elle reflète aussi la richesse du droit français, où l’histoire, les spécificités régionales et les traditions locales peuvent encore façonner des exceptions juridiques.
Dans un pays où hériter coûte souvent cher, la Corse fait figure d’exception. Et tant que cette singularité perdurera, elle continuera d’attiser la curiosité, d’alimenter les débats… et de soulager les héritiers insulaires.